Tant que nous n’aurons pas semé aux quatre vents,
En nos terres fertiles des campagnes et des villes,
De Hull à Blanc Sablon, de Val d’Or à Gaspé,
Le bon grain souverain nos efforts seront vains pour nous émanciper.
L’idée de liberté n’est pas idée d’un jour
Que fredonne en passant un joyeux troubadour,
Ni fumeuse pensée de secte illuminée,
Non plus que pirouette de l’amuseur du roi;
Trois petits tour et puis s’en va,
Comme rires de clown qui se fondent en larmes.
C’est bien le cri puissant de l’enfant nouveau-né
Qui respire et veut vivre quand la mère le délivre.
Et c’est la lourde marche inscrite dans l’Histoire
Dont les pas sonnent encore sur notre sol d’espoir.
Ces pionniers, ces pionnières ont enrichi nos terres
De sueur et de sang. Ces pendus, ces brûlés,
Ces glorieux patriotes, écrasés sous la botte.
Laisserons-nous gaspiller si précieux héritage?
Écouterons-nous longtemps ces oiseaux de malheur?
Ces lugubres corbeaux qui distillent la peur.
Les gazettes et les ondes qui endorment le monde?
Au nouveau millénaire, réveillons-nous mes frères!
Le blé est mûr, la terre est dégelée et l’ivraie arraché.
Sans nous laisser distraire par les chants de sirènes
Des sondages savants, de beaux discours à droite,
À gauche des grincements. Sans compter notre peine
Rallions tous les rangs et marchons fièrement.
Beau Québec, tu vaux bien cette peine!
Par les rocs solides, montagnes Laurentides,
Par l’immense toison du poumon boréal,
Par les milliers de lacs qui retiennent les eaux
D’où coulent les rivières nourricières
Des mammifères marins dans le large estuaire
Du Saint-Laurent géant.
Par six millions d’humains qui, la main dans la main
Et le regard braqué vers de beaux lendemains
D’une voix unanime entonneront leur hymne
Debout en un seul choeur au concert des Nations.